© Photo d’illustration/Les présidents Chinois et Russe, Xi Jiping et Vladmir Poutine

Longtemps considérée spéculative, la «renminbi» semble en pleine transfiguration puisque de tels volumes la rendent attractives pour investisseurs alternatifs en quête de valeurs refuges. De fait, alors que la tourmente du rouble et de l’économie russe provoque sur les marchés financiers des secousses majeures, la stabilité du yuan au même moment est fort révélatrice.

Cette force de la monnaie chinoise fait évidemment l’affaire des autorités de ce pays qui concentrent depuis 2002 leurs efforts pour encourager et pour pousser à ce que toujours davantage de transactions commerciales internationales soient libellées en yuan. La reconnaissance de leur devise semble désormais un fait acquis. Très ambitieuse, la Chine vise bien à transcender le SWIFT – dont la Russie vient d’être retirée d’exploitation – pour ne plus être dépendante de ce réseau contrôlé par l’Ouest, et n’avoir pas un jour à subir l’entreprise de démolition méthodique subie par l’économie russe.

Voilà pourquoi elle travaille consciencieusement depuis de nombreuses années à installer et à améliorer son propre système concurrent de paiements internationaux libellé en renminbi – Cross-Border Interbank Payments System (CIPS) – qui compte quand même aujourd’hui 1.200 établissements affiliés à travers 100 pays, et dont le volume des transactions a progressé de près de 25% en 2 ans pour atteindre 8.000 milliards de dollars environ. L’enjeu étant de casser la domination absolue américaine et européenne sur le trafic des paiements – vital pour toute économie – et où SWIFT reste le poids absolu puisqu’il compte plus de 11.000 membres à travers le globe.

On dit que les déboires russes représentent à ce titre une opportunité pour la Chine qui met progressivement au service des consommateurs de ce pays des cartes de crédit et de débit émises par des banques chinoises dans un contexte où Visa, Mastercard et American Express ont suspendu en Russie leurs opérations. Cette intégration économique des deux nations se révèle être un véritable mouvement de fond qui, en réalité, a démarré dès 2014 et dès l’invasion de la Crimée qui a sonné le début des efforts conjugués des deux pays pour diminuer activement la part du dollar dans leur commerce bilatéral. Aujourd’hui, tandis que la part du billet vert a chuté à moins de 50% dans le commerce entre ces deux pays, des accords financiers ont également été signés entre leurs banques centrales respectives dont l’objectif frontal est de s’extirper de la dépendance vis-à-vis de l’Ouest. Le système des sanctions et l’exemple éloquent de la rudesse de celles tout récemment imposées à la Russie font déjà réfléchir très sérieusement des nations honnies comme l’Iran ou le Venezuela et les précipitera à court terme et à coup sûr corps et âme dans les bras de la Chine, de son système bancaire et de son réseau CIPS. Ce qui susciterait une réflexion profonde pour les banques africaines.

La Chine soutiendra de manière illimitée la Russie

Pour ce faire, leurs banques centrales sont en passe de détenir une part importante de Yuan dans leurs réserves, à l’image de la Russie dont près de 15% du trésor de guerre est exprimée en monnaie chinoise.

Il va de soi que la Chine profite de sa position prédominante pour commercer, travailler et financer des nations sous embargo comme l’Iran et la Corée du Nord, ceci sans nullement se soucier de possibles sanctions à son encontre qui ne se matérialiseront peut-être pas, car les États-Unis ne franchiront jamais cette ligne rouge avec celle qui sera prochainement la première puissance économique mondiale. On voit que le message de Pékin est donc limpide : la Chine soutiendra de manière illimitée la Russie, et par-delà apportera un certain réconfort matériel à toutes les nations qui seront mises au pas par les USA.

Á l’heure où le G7 fait savoir qu’il refusera catégoriquement de régler le pétrole russe en Rouble comme l’exige aujourd’hui le Kremlin. Cette fin de non-recevoir est en soi une preuve éclatante du pouvoir extraordinaire que conserve le Dollar. Mais jusques à quand vue que l’on voit se lever face au G7 le BRICS-les cinq pays émergeants des économies du monde (Brésil, Russie, Indes, Corée du nord et Afrique du Sud). Ce ne sera plus que la monnaie des marchés pétroliers et d’une écrasante majorité de marchandises ou de produits financiers.

Il faudra bien plus qu’un oukase de Vladimir Poutine pour renverser la table. D’autres États sont inquiets de voir à quel point la monnaie américaine est devenue une arme de guerre susceptible de détruire leur propre économie y compris l’euro, ils tentent donc de trouver une alternative, avec encore bien peu de résultat concret pour le moment.

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