Bien que l’année 2020 a été éprouvante pour les nerfs. Le monde n’a pas été  davantage préparé à vivre 2021, qui a dû ressembler aux premiers mois au précédent cru. Avec toutefois l’effet surprise en moins. Avant de tourner définitivement la page au Covid-19, quelques faits, statistiques et prévisions… Source le Journal de la Marine Marchande.

Une croissance inévitable pour  2021 

Selon la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (Cnuced), il était  attendu que le transport maritime solde l’année infernale par un recul de 4,1 %. Elle aura alors parachevé le travail de sape que les tensions commerciales avaient entamé en 2019, année marquée par des volumes plafonnant (+ 0,5 %) pour s’établir à 11,08 milliards de tonnes. Avec une hausse de 2,8 % en 2018, le secteur était déjà en repli par rapport à 2017.

 La Cnuced a misé cependant sur un redressement des flux maritimes de 4,8 % en 2021 et un rebond du PIB mondial de 4,1 % quand le Fonds monétaire international fixe la croissance de cet indicateur des richesses à 5,4 %. L’OMC a estime pour sa part que le volume du commerce mondial de marchandises devrait se replier de 9,2 % en 2020, puis reprendre de la vigueur en 2021 et enregistrer une croissance de plus de 7 %.

Des aléas en nombre

Si les perspectives à court terme du commerce maritime restaient aléatoires, il y avait au moins une certitude : l’incertitude aura été un des thèmes dominants pour les mois à venir à la fin de 2021. Établir un calendrier sur les étapes de reprise avait relevé de la mission à fonds perdu. De nombreux facteurs avaient été influencés sur les perspectives dont l’évolution de la pandémie, la résilience de la demande, l’efficacité des plans de relance, le développement de l’e-commerce, les arbitrages dans les dépenses de consommation, la confiance des entreprises, etc.

Les chiffres saillants de 2020

Avant de tourner la page, qu’avait découvert le monde en 2020 ? Sans doute le principal enseignement de cette année qui tenait dans un pourcentage devenu viral en période du mois de mars : dans le commerce mondial, 20 % des produits intermédiaires manufacturés provenant de la Chine, contre 4 % en 2002. 

Avec les mesures de confinement induites par la crise sanitaire, l’homme de la rue aura découvert peut-être le sort des 400 000 marins qui se sont retrouvés bloqués en mer ou à terre du fait des restrictions de déplacement. Nombre d’entre eux ont sans doute perdu leur emploi de ce fait. Certains ont été abandonnés à leur sort par des armateurs peu scrupuleux. 

2020 était resté aussi dans les mémoires des acteurs du conteneur comme l’année où les taux de fret ont atteint des niveaux extraordinaires (et ce n’est pas fini). Ils avaient augmenté de 106 % entre mai et décembre de cette année-là. Sur certains trafics, les taux avaient augmenté quatre fois en un seul mois. Ils étaient le résultat d’un contrôle des coûts et d’une gestion des capacités très stricts. Les compagnies maritimes avaient trouvé la recette financière pour compenser le vil prix du transport dont tout un chacun profitait. Les dix premiers transporteurs avait engrangé « collectivement » des bénéfices d’exploitation rarement atteints, entre 11 et 14 milliard de US$ selon les sources. Individuellement, Maersk avait terminé 3e trimestre à 2,3 milliard US$ (+ 39 %), Cosco à 5,77 milliard US$ (+ 13,5%), CMA CGM à 1,7 milliard US$ (+ 68 %), Hapag-Lloyd à 768 milliard US$ (+ 17 %), ZIM à 262 milliard US$ (+ 145 %) et ONE à 872 milliard US$ (+ 78 %). 

Alors que les navires étaient parfaitement inutiles en début d’année, ils étaient devenus essentiels en seconde partie. La sacro-sainte religion de l’orthodoxie financière, qui imposait aux compagnies opérant dans le conteneur de faire ceinture sur les commandes, avait été violée en fin d’année. Elle s’était soldée par un festival de consommation. À fin septembre, la flotte mondiale de porte-conteneurs s’était étoffée de 93 navires totalisant 630 775 EVP, correspondant à 71 % des livraisons prévues. Seuls 30 navires (177 434 EVP) avaient été commandés. Le carnet de commandes s’était ainsi stabilisé à 2,1 MEVP, à peine 9 % de la flotte, le niveau le plus bas depuis des décennies. En fin d’année, les commandes de Hapag-Lloyd (six unités de 23 500 EVP) et d’ONE (six unités de 24 000 EVP) donnaient un tout autre signal. Il y aurait donc 18 méga max en commande avec les six que pourrait affréter MSC (quatre de 24 000 EVP et deux de 24 232 EVP). 

CMA CGM pourrait reprendre sa 3e place mondiale en fin 2021 pour 2022 

En termes de livraisons, deux compagnies ont largement contribué à la croissance de la flotte de porte-conteneurs en 2020. Grâce à ses douze méga max, la compagnie sud-coréenne HMM a augmenté sa flotte de 85 %, passant du 10e au 8e rang mondial par la capacité, et avec ses 1,7 MEVP, elle peut se prévaloir de 3 % de parts de marché. Avec ses quatre unités livrées de 23 112 EVP au GNL, CMA CGM a étoffé ses capacités de 11,8 % en 2020 et a pu reprendre en 2021 la troisième place du classement mondial que lui avait ravie Cosco, l’écart entre les deux portant sur quelque 10 367 EVP. Or, CMA CGM doit réceptionner cette fin d’année les cinq autres méga max de sa série au GNL et d’autres…

Le leader mondial Maersk se distingue par sa sobriété. Sa capacité a diminué de 2 % en 2020 pour se fixer à 4,1 MEVP. L’écart avec MSC se réduit (251 000 EVP) puisque le numéro deux mondial avait significativement gagné des EVP (+ 2,4 %), notamment via des navires d’occasion.

Pour l’organisme danois, les navires de moins de 5 000 EVP pourraient alors bénéficier de ces orientations. À l’inverse, sur les grands axes, la croissance de la demande devrait stagner, voire décliner. Malgré les distances plus courtes entre partenaires commerciaux, une intégration verticale plus poussée ne nuirait pas forcément au conteneur. « Afin de suivre l’évolution du sourcing, un rééquilibrage permanent du pool de navires sera nécessaire. Une part plus importante d’unités affrétées par rapport à celles détenues en propre donnerait aux opérateurs de lignes la souplesse nécessaire pour réorienter rapidement leurs services en fonction des préférences des clients. »

Dans l’environnement très caractéristique de 2020 – confinement, travail à distance, commerce électronique accru, supply chain perturbée –, les outils en ligne auront démontré leur pertinence. L’épidémie avait notamment mis en évidence tout l’intérêt de tracer les mouvements des navires voire générer des systèmes d’alerte en cas de non-respect des horaires de navigation. Elle avait aussi fait ressentir la nécessité de disposer de normes communes, le manque d’interopérabilité constituant aujourd’hui un vrai frein à la digitalisation du transport maritime. 

Les normes et l’interopérabilité s’imposant, la cyber sécurité est devenue une autre préoccupation. Les attaques dernières contre CMA CGM et l’OMI, avec effets paralysants, en font une urgence. Le recours accru aux technologies digitales va dès maintenant de surcroît aggraver les vulnérabilités. Les cyber-risques vont s’imposer dans les systèmes de gestion de la sécurité. La résolution MSC.428, adoptée en 2017 par l’OMI, enjoint les États membres à s’assurer que le cyber risque est bien intégré dans le système de gestion de sécurité des entreprises depuis le 1er janvier 2021. Identifier, protéger, détecter, réagir et récupérer c’est ce qui fera l’expertisassions en 2022. C’était le nouveau mantra de l’OMI, qui en avait fait un de ses grands sujets de 2021… avec le changement climatique.

L’organisation de régulation du transport maritime devra accélérer l’agenda de la décarbonisation du transport maritime pour ne pas perdre sa primauté et se faire courser par des réglementations plus régionales.

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